Se loger à Dakar à tout prix mais pas à n’importe quel prix : 4 stratégies à adopter pour vivre en paix en location et trouver un logement décent.

La recherche d’un logement à Dakar reste une aventure fastidieuse pour tout client qui doit être résilient à cause de l’injustice, de la méchanceté, et de la malhonnêteté de certains propriétaires et courtiers qui dictent leur loi en toute impunité. Dans cet article, je tiens à partager avec vous l’expérience malheureuse que j’ai eue avec mon ancienne propriétaire et deux courtiers entre 2018 et 2021, le but étant de dénoncer leurs magouilles qui ont un impact réel sur la vie des gens, notamment, la mienne. Je tiens juste à préciser que cet article ne vise pas à saboter qui que ce soit mais à montrer comment j’ai pu malgré tout capitaliser sur des expériences négatives avec ma propriétaire et des courtiers malhonnêtes pour trouver un logement correct après un déménagement précipité en mi-2021.

  1. Connaître ses droits de locataire

Tout commença en mars 2018 quand, en quête d’indépendance, je dus chercher un appartement. Pour m’aider dans cette tâche, j’ai sollicité, comme la plupart des gens, les services d’un courtier. Ma vision d’un appartement idéal comprenait plusieurs critères comme celui de la proximité avec la route et de commerces pouvant répondre à mes besoins alimentaires et médicaux. Je voulais, en d’autres termes, habiter près d’une boutique, une supérette, et une pharmacie. Ce dernier trouva rapidement l’endroit idéal. Il s’agissait d’un studio situé aux Mamelles qui répondait à toutes mes attentes et plus, car situé à seulement 10 minutes de mon lieu de service. Pensant avoir remporté le Jackpot, j’ai réalisé qu’on ne constate les défauts d’un logement qu’après son emménagement. Après m’être acquittée d’un paiement équivalent à deux mois de caution, un mois de loyer et des frais de courtage équivalant à la moitié du loyer,  j’ai pu enfin m’installer chez moi et ce fût le début des problèmes occasionnés par une propriétaire un peu trop envahissante qui habitait juste en dessous de mon studio. Sa proximité avec les locataires semblait lui donner un droit de regard sur nos faits et gestes qu’elle épiait. J’ai dû tout supporter car je devais me refaire une santé financière après avoir énormément dépensé d’argent dans le passé.

Un an seulement après mon emménagement aux Mamelles, elle m’informe qu’elle souhaiterait augmenter le prix du loyer de 15.000 Fcfa et ceci sans aucune argumentation juridique. J’ignorai sa requête qu’elle ne mit pas immédiatement à exécution. Ce n’est que deux ans plus tard qu’elle me relança. Cette fois-ci, elle souhaitait augmenter le loyer de 25.000 Fcfa, toujours sans aucun fondement légal. Et, je tiens à souligner que quasiment tous ses locataires ont été victimes de son comportement excessif et de cette augmentation de loyer en toute violation de la loi n° 81-21 du 25 juin 1981 réprimant la hausse illicite du loyer des locaux à usage d’habitation. Il est important de souligner que les sanctions infligées par les pouvoirs publics sont d’ordre pécuniaires à titre d’amende et ou des peines d’emprisonnement.

Mon refus catégorique de céder à cette dame m’a valu tous les ennuis du monde. En effet, sans me donner de préavis, il était question que je sorte de chez elle et en toute ignorance j’ai décidé de le faire dans les deux mois qui suivaient.  Avec du recul, et connaissant les agissements de la dame je me suis renseignée et j’ai été informée des dispositions prises par la loi qui stipule que le locataire dispose d’un préavis de 06 mois qui le protège en restant sur les lieux et en cherchant un nouveau local tout en payant son loyer.

Le délai de deux mois n’étant pas réaliste, j’ai donc essayé de négocier pour obtenir un mois de plus, mais la dame a été ferme et a refusé cette proposition. J’ai trouvé cela injuste et c’est alors que je me suis entourée de juristes et de policiers pour faire valoir mes droits, et tous m’ont proposé de m’accompagner dans une procédure judiciaire le moment venu. Certains bailleurs sont vraiment de mauvaise foi et même en connaissant la loi, la dame voulait seulement que je libère le studio, elle n’avait ni l’intention de prendre le studio pour habiter elle-même ou pour usage de sa famille ou encore pour le démolir et le reconstruire comme le prévoient les textes. Elle avait hâte que je le libère rapidement pour pouvoir effectivement trouver un locataire et augmenter le loyer. Bien que cela soit interdit, la majorité des propriétaires à Dakar prennent leur mal en patience attendant que le locataire décide de s’en aller pour augmenter le loyer. Mon ancienne propriétaire usa de diverses stratégies pour me précipiter vers la sortie: après avoir reçu des menaces de me couper l’eau, elle demanda à l’électricien de saboter mon compteur d’électricité. Je ne suis pas la seule victime dans ce cas de figure, comme en témoigne cet article intitulé: « Les propriétaires sont prêts à tout pour expulser leur locataire ».

Malgré tout, je ne tremblais même pas, j’avais la loi de mon côté, ce qui me poussa à l’informer de mon intention de rester dans mon logement selon les délais prévus par la procédure de préavis au Sénégal. Et, ceci m’a valu d’être taxée de malhonnête et d’inhumaine. La situation était devenue tellement tendue entre elle et moi que cette dernière ne me laissait plus tranquille. J’étais harcelée et je commençais à étouffer.

Contrairement à ce qu’elle pensait, j’avais en tête de quitter le studio bien avant sa décision, car je me sentais épiée en longueur de journée. J’y suis restée longtemps car comme je l’ai dit plus haut, je devais me refaire une santé financière. Son comportement et son souhait ont été une source de motivation pour m’en aller. En effet, dès l’annonce de l’augmentation probable du prix du loyer, je me suis mise  à la recherche d’un autre appartement à Dakar, mon désir n’étant pas de couvrir les 06 mois de préavis, mais de rapidement trouver un logement adéquat. De nature calme, et patiente, j’étais prête à aller en justice et sur ce terrain, elle savait qu’elle aurait perdu le procès.

2. Avoir des ressources humaines 

La recherche d’un autre logement exige des ressources humaines. En effet, plus votre réseau est grand, plus grande sera votre chance de trouver un bon logement. Une des stratégies utilisée a été de m’abonner à plusieurs pages sur Facebook destinées à la location de logements. J’y ai rencontré des inconnus qui auraient pu m’arnaquer, c’est vrai mais, j’ai également pu compter sur le soutien de certaines personnes pour avoir de bonnes recommandations. Bien que fastidieuses et dangereuses, ces étapes étaient cruciales si  je voulais augmenter mes chances de trouver un endroit paisible où habiter. J’ai connu mon lot de déceptions en commençant par le premier studio visité le 04 juin 2021. Et, j’ai été spécialement sidérée par deux autres studios. Quand j’y repense, je me dis que les propriétaires manquent tellement de respect aux gens que c’est à en pleurer. Figurez-vous que pour entrer dans un studio de 120.000 Fcfa qui se trouvait à Ouakam, il fallait passer par la terrasse, oui je parle bien de la terrasse qui était le seul moyen d’entrer et de sortir. De surcroît, il était tellement étroit et mal aéré qu’un asthmatique y serait mort. Un peu plus loin, j’ai visité un studio de 150.000 Fcfa dans lequel il fallait passer par la chambre pour entrer et sortir de la cuisine, je vous laisse imaginer la gymnastique tout en sachant qu’il n’y avait aucune possibilité d’inverser la chambre et le salon. Entre prix exorbitants, et propositions indécentes émises par les courtiers, le souvenir de mon projet locatif reste amer. 

La recherche du logement exige aussi des ressources financières, du temps, de la patience et un état de santé stable. J’ai dû beaucoup marcher et me faire malmener par des courtiers. La fatigue s’est vite installée avec le temps mais j’ai tenu bon parce que je devais trouver un logement paisible et propice à mon épanouissement.

3. Connaître le jargon

Une autre ressource qui m’a permis de naviguer habilement dans ce marché trouble, c’est l’apprentissage du jargon des courtiers de Dakar. On distingue l’entrée salon, le studio séparé, et le mini-studio. De tous ces noms utilisés,  j’ai particulièrement été marqué par le mini-studio qui, au Sénégal, est un espace composé d’une chambre, d’une douche et d’une cuisine qui peut varier entre 110 000 Fcfa et 130 000 Fcfa. Notons que les chambres avec douches et donnant accès à la cuisine varient entre 60 000 Fcfa et 80 000 Fcfa. Quant aux studios (mini studio et salon), il existe la possibilité d’avoir une toilette pour les visiteurs. Les prix peuvent varier entre 150.000 Fcfa et 250.000 Fcfa. En outre, le propriétaire peut exiger 03 ou 04 mois d’avance. Cette somme est répartie comme suit: un mois de caution ou deux mois, un mois de commission et un mois de loyer en cours. Le loyer des appartements de deux chambres varie sensiblement  entre 250.000 Fcfa à 350.000 Fcfa voire plus.  

Annonces de certains courtiers pris sur les pages facebook et statut whatsapp

Après près de 04 mois de recherches intenses, j’ai finalement trouvé un studio plus ou moins correct. J’ai dû payer trois mois repartis comme suit: Un mois de caution, un mois de commission et un mois pour le mois en cours. En effet, j’ai légèrement hésité à le prendre en apprenant que les propriétaires habitaient également dans l’immeuble. Il faut noter que je m’étais promis ne plus jamais commettre cette erreur monumentale. Il m’a fallu me renseigner auprès de mes contacts qui m’ont assuré que tous les propriétaires ne sont pas pareils. J’ai donc déposé mes valises à quelques kilomètres de mon ancien logement. Pour le moment, mes propriétaires sont corrects.

4. Écouter votre instinct 

Au vu de mon expérience, je voudrais insister sur la nécessité de réguler le prix des loyers au Sénégal avec un accent particulier sur le courtage. En effet, cela devient une jungle dans laquelle chacun agit à sa guise en profitant du laisser-aller actuel pour arnaquer les honnêtes clients. Un jour, j’étais prête à prendre un studio mais, au moment de signer le contrat, j’y ai renoncé parce que j’avais découvert que les courtiers avaient failli me berner. Il faut savoir qu’au Sénégal, certains bailleurs utilisent les services d’une agence comme intermédiaire pour louer leurs appartements. Malheureusement, il arrive que certains intermédiaires augmentent le prix du loyer déjà élevé à l’insu de leur client et du propriétaire. Si le prix du studio est, par exemple fixé à 150.000 Fcfa, les autres parties diront qu’il coûte 170.000 Fcfa pour toucher à la fin de chaque fin de mois, 20.000 Fcfa.

J’aimerais aussi dénoncer le fait que certains courtiers/agences, sur ordre du propriétaire, excluent dans leur offre: les couples, les femmes avec enfant, et certaines nationalités. En outre, ils exigent aussi des bulletins de salaire qu’ils considèrent comme une preuve qui montre que le locataire est en mesure de payer le loyer. Les agences et les locataires préfèrent rester dans cette logique absurde car, pour ma part, un bulletin de salaire ne mentionne ni les charges quotidiennes, ni les dettes du locataire.

Si la flambée des prix des loyers au Sénégal a permis d’adopter la Loi n°2014-03 du 22 janvier 2014 portant baisse des loyers n’ayant pas été calculée suivant la surface, elle demeure peu pratiquée. Tant bien que mal, certains bailleurs ont appliqué les barèmes fixés par la loi sur la diminution du prix du loyer, et d’autres ont usé de diverses ruses pour expulser leurs locataires. Selon un article, les données gouvernementales, les loyers ont augmenté de 256% dans la région de Dakar entre 1994 et 2014. Une hausse qui s’est poursuivie depuis lors au même rythme, selon les spécialistes du marché immobilier. Le manager de l’agence “Mon agent immobilier” Abdoul Diédhiou à lemonde.fr affirme qu’un un lieu loué à 150 000 Fcfa par mois en 2014 est maintenant loué à 350 000 Fcfa. 

 Le Sénégal est un beau pays, avec de belles opportunités et il est important de renforcer les acquis et d’alléger la souffrance des populations. Les décisions présidentielles et ministérielles ne suffisent pas. Sept ans depuis l’adoption de la loi de 2014 au Sénégal, lors d’un Conseil des ministres du 17 novembre 2021, le Chef de L’Etat a insisté sur « L’urgence de finaliser, d’ici fin décembre 2021, l’entrée en vigueur du nouveau dispositif national de régulation et de contrôle des loyers ». Un mois avant, le président de la République Macky Sall au cours du Conseil des ministres du mercredi 27 octobre 2021, a rappelé avec insistance « la nécessité d’une régulation urgente des prix du loyer ». Tout récemment le 07 décembre 2021 le Ministre du Commerce a rappelé que le Décret n°77- 527 du 23/06/1977 relatif au montant du loyer à usage d’habitation, stipule en son article 7 alinéa 3, que «le montant du cautionnement et des loyers à verser d’avance à titre de garantie ne peut excéder une somme correspondant à deux (02) mois de loyer». Les bailleurs et commissionnaires de bailleurs «sont tenus aux respects stricts des dispositions règlementaires susvisées sous peine de poursuites judiciaires devant le Tribunal de Grande Instance». En 2020 le Président s’est engagé à construire 100.000 logements sociaux sur 5 ans et avait déclaré que la construction était ’’plus que jamais un programme de haute priorité’’. Ce programme à pour but, entre autres, d’éradiquer les bidonvilles à l’horizon 2035 et d’accélérer l’offre de logements décents et accessibles, accélérer et diversifier l’offre de logements pour les ménages à revenus faibles et/ou irréguliers.

Il ne suffit pas juste de voter une loi, il faut aussi s’assurer de sa durabilité en mettant en place un mécanisme de suivi et d’évaluation pour s’assurer de son implémentation au niveau local. En d’autres termes, ces mécanismes doivent garantir le respect des droits des locataires qui, abandonnés à eux-mêmes, n’ont pas d’autres choix que de subir les malversations de leurs propriétaires et courtiers plutôt que déménager parce que le déménagement leur reviendra cher.

Articles connexes qui méritent d’être lus: 

http://news.adakar.com/h/103625.html 

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/09/03/senegal-les-loyers-explosent-a-dakar_6093324_3212.html

https://www.pressafrik.com/Cherte-du-loyer-a-Dakar-La-non-application-de-la-loi-sur-la-baisse-au-banc-des-accuses_a232461.html

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